L’urubu à tête rouge : l’oiseau du printemps par excellence

Le billet d’aujourd’hui a été rédigé par Sarah Wiebe, guide au parc provincial Rondeau

Qu’imaginez-vous en pensant à l’observation des oiseaux au printemps dans le parc provincial Rondeau?

Un plumage coloré? D’incroyables volées d’oiseaux aquatiques? De beaux chants d’oiseaux? Après tout, le printemps est une période passionnante pour l’observation des oiseaux, tandis que beaucoup attendent avec impatience l’arrivée des parulines.

Lorsque je pense au fait d’observer les oiseaux au printemps, je pense à l’un des oiseaux les plus répugnants et les plus laids d’Amérique du Nord, et l’un de nos premiers migrateurs printaniers.

Ces oiseaux n’émettent pas le joli cri du bruant à gorge blanche, n’arborent pas les couleurs vives de la paruline jaune et n’entretiennent pas l’histoire d’amour de l’oriole de Baltimore avec la confiture de raisins.

Aujourd’hui, j’aimerais vous présenter l’un de mes oiseaux printaniers préférés : l’urubu à tête rouge.

Alors que d’autres recherchent les parulines aux couleurs éclatantes, les urubus à tête rouge sont les héros méconnus du printemps.

Je vous présenterai quelques caractéristiques et comportements distinctifs des urubus à tête rouge, depuis leur technique de vol jusqu’aux astuces qu’ils déploient pour décourager les prédateurs.

J’espère pouvoir vous faire changer d’avis à leur sujet et vous convaincre qu’ils représentent l’oiseau printanier par excellence.

Ils forment l’équipe de nettoyage des scènes de crime du monde animal

Les urubus à tête rouge jouent un rôle essentiel pour maintenir la propreté de notre environnement. La mort survient, et ces oiseaux n’hésitent pas à faire le ménage d’un cadavre très endommagé. Même que leur nom scientifique signifie « brise purificatrice ».

Ils peuvent sentir les animaux morts ou les charognes à plus de 1,5 km de distance et possèdent le système olfactif (le système qui permet de percevoir les odeurs) le plus développé de tous les oiseaux. La plupart des oiseaux n’ont pas d’odorat!

On les trouve souvent le long des routes, la tête plongée dans une carcasse. Ils se nourrissent principalement de mammifères morts depuis peu, y compris de moufettes! Les urubus à tête rouge sont connus pour mettre délicatement de côté les glandes odorantes d’une moufette, puis manger cet animal.

À cette idée, vous sentez peut-être votre estomac se retourner, et vous vous demandez peut-être comment font-ils pour manger de la nourriture en décomposition sans tomber malades?

Les urubus à tête rouge ont un système immunitaire incroyablement robuste et un estomac à l’acidité très élevée permettant de tuer les bactéries qui causent des maladies telles que le botulisme, l’anthrax, le choléra et la salmonelle.

On a accusé à tort ces oiseaux de propager des maladies, alors qu’ils font exactement le contraire.

Sans les urubus à tête rouge, les cadavres d’animaux s’accumuleraient et les maladies pourraient contaminer nos eaux et nos sols. L’urubu à tête rouge est un si bon nettoyeur que l’acide de son estomac tue les bactéries et, lorsqu’il défèque, le risque de maladie a disparu.

Ils se lavent même les pattes après, en urinant dessus, ce qui fait d’eux des oiseaux si prévenants.

Les urubus à tête rouge sont préparés pour réaliser ce travail si rebutant

L’apparence et les comportements étranges de l’urubu à tête rouge sont essentiels à sa survie.

L’une des caractéristiques les plus frappantes de l’urubu à tête rouge est sa tête rouge vif et dépourvue de plumes. Ils tirent leur nom anglais (turkey vulture) du dindon, qui a une tête rouge similaire. Ce crâne chauve leur permet de s’approcher de très près des animaux morts sans salir leurs plumes ni devenir un terrain propice à la prolifération des bactéries.

À gauche : l’urubu à tête rouge À droite : un dindon

Ils possèdent également un bec puissant qui les aide à déchiqueter et à arracher la viande d’une carcasse. Contrairement à d’autres grands rapaces, les urubus à tête rouge ont de petites serres et des pattes faibles qui ne leur permettent pas de capturer des proies. Certains comparent même leurs pattes à celle d’un poulet.

Avez-vous déjà entendu le magnifique chant de l’urubu à tête rouge? En fait, c’est peu probable. Ils n’ont pas l’organe vocal qui permet aux oiseaux de chanter; ils se contentent donc d’émettre une série de grognements et de sifflements.

Ils ont également des comportements bizarres. Les trois comportements suivants sont les plus faciles à retenir :

  • ils se curent le nez pour faire sortir la chair en décomposition;
  • ils urinent sur eux-mêmes pour se nettoyer et se rafraîchir lors de journées chaudes;
  • ils régurgitent sur leurs ennemis : si quelqu’un s’approche trop près de leur nid, ils vomissent sur leurs prédateurs de la chair en décomposition partiellement digérée et de l’acide gastrique caustique.

Bien qu’ils soient les oiseaux les plus répugnants qui soient, leur vol est néanmoins majestueux!

Les urubus à tête rouge tirent parti de l’énergie solaire pour s’élever vers de nouveaux sommets.

Pour moi, l’envol des urubus à tête rouge signale toujours l’arrivée du printemps.

La vue du « V » formé par les ailes de l’urubu à tête rouge lorsqu’il vole dans le ciel est toujours la bienvenue et me fait sourire. Possédant des ailes d’une envergure d’environ 6 pi (plus large que mes bras), ce sont des oiseaux dont l’envol est majestueux et le vol hésitant, ces derniers battant rarement des ailes.

Les urubus à tête rouge travaillent plus intelligemment, pas plus durement

Lors des jours ensoleillés, le sol plat est chauffé par le soleil et l’air chaud monte, ce qui permet à l’urubu à tête rouge de s’élever avec un minimum d’effort.

Au-dessus des zones où l’air est plus frais, comme les lacs et les forêts, ils peuvent planer vers le bas lorsque l’air frais descend.

C’est que l’on appelle des courants thermiques, qui leur permettent de planer jusqu’au sol pour sentir la nourriture puis de remonter vers des points d’observation plus élevés.

Il est souvent possible de les apercevoir en train de voler au-dessus du parc provincial Rondeau, et occasionnellement, se percher dans les arbres le long de nos sentiers de randonnée.

Un groupe d’urubus à tête rouge qui plane en suivant les courants effectue un vol en spirale, rappelant l’eau qui bouillonnent dans une marmite. Ils migrent du sud des États-Unis vers le Canada chaque printemps et chaque automne. Ils peuvent parcourir plus de 300 km par jour et sont parmi les premiers à migrer au printemps.

Heureusement pour nous, depuis 1966, les populations d’urubus à tête rouge augmentent chaque année de près de 2 %.

Malgré les effets du saturnisme (intoxication par le plomb), du DDT et d’autres toxines que leur nourriture a pu ingérer, ils prospèrent et continuent à nettoyer les animaux tués sur les routes les plus repoussants.

Acclamons l’urubu à tête rouge!

Bien qu’il ne soit pas le plus bel oiseau du printemps, il est certainement l’un des plus ingénieux et mérite d’être mieux reconnu.

Sa capacité à nettoyer, son apparence particulière et sa façon ingénieuse de voler font de cet oiseau un spectacle à ne pas manquer au printemps!

Articles connexes

white trillium

Les trilles de l’Ontario

Le billet d’aujourd’hui a été rédigé par Pilar Manorome, écologiste de zone adjointe. Le printemps est probablement ma saison préférée,