Le billet d’aujourd’hui a été rédigé par Heather Stern, commise principale du parc Samuel de Champlain depuis sept saisons.

Le soir du 21 juin 2025, le parc provincial Samuel de Champlain a connu l’un des événements météorologiques les plus destructeurs de son histoire.
Ce qui avait commencé comme un orage d’été typique s’est rapidement transformé en de violentes rafales s’abattant sur le parc, rasant des forêts et écrasant des véhicules et des remorques, forçant ainsi la fermeture du parc pour le reste de la saison.
Pour ceux qui connaissent le parc comme un sanctuaire de pins imposants et de sentiers paisibles, cette transformation était inimaginable.


Que s’est-il passé?
Peu après 21 h, une violente tempête s’est abattue sur la région, accompagnée de foudre éclatante, de pluies torrentielles et de vents violents.
La tempête a déclenché des rafales descendantes, une colonne d’air puissante s’abattant depuis les nuages et se propageant vers l’extérieur lorsqu’elle entre en contact avec le sol. Contrairement à une tornade, qui tourbillonne sur elle-même, une rafale descendante s’abat verticalement puis se déploie en éventail, causant des dégâts considérables en à peine quelques minutes.
Les vents ont dépassé les 100 km/h, brisant des pins centenaires comme des cure-dents et déracinant des dizaines de milliers d’arbres dans les terrains de camping et les sentiers du parc.
Résultats : routes bloquées, lignes électriques tombées et campeurs coincés dans leurs tentes et leurs caravanes.

Parmi les zones les plus touchées, le terrain de camping Jingwakoki et le site du Centre écologique du Canada ont subi d’importants dégâts aux infrastructures. Les majestueuses forêts de pins, que des générations de visiteurs avaient explorées et qui abritent d’inoubliables souvenirs, ressemblent désormais à des terres dont les forêts sont coupées à blanc.
L’état chaotique du parc, enchevêtré d’arbres et de branches tombés, a rendu l’évacuation extrêmement difficile pour toutes les personnes qui se sont mobilisées pour offrir de l’aide. Heureusement, il n’y a eu aucune perte de vie liée à cette tempête.
L’impact de la tempête a été si violent que nous n’avons pas eu d’autre choix que de fermer le parc pour le reste de la saison 2025.
Les conséquences : surréalistes et déchirantes
Pour nous, les conséquences étaient surréalistes.
La sécurité était notre priorité absolue alors que nous nous efforcions de dégager les routes, d’évaluer les dégâts et de permettre aux campeurs de récupérer leurs effets personnels. Mais le coût émotionnel était bien lourd. Les arbres continuaient à tomber pendant les jours suivant la tempête, leurs racines ayant été déstabilisées par les premières rafales, ce qui a accentué nos inquiétudes.
Les zones où nous travaillions quotidiennement et que nous connaissions par cœur étaient soudainement méconnaissables. Les repères familiers avaient disparu sous des masses enchevêtrées de débris tombés. Essayer de s’orienter sans aucun repère familier a été une expérience vraiment troublante.


Il y avait, et il y a toujours, un sentiment de deuil pour la perte des majestueux arbres anciens du parc, dont certains étaient centenaires. En plus d’un sentiment de sécurité anéanti dans un lieu où d’innombrables visiteurs venaient se reposer et se ressourcer.
Par moments, je m’arrêtais au milieu des décombres du terrain de camping, submergé par le silence assourdissant, rompu uniquement par la chute occasionnelle d’un autre arbre, alors que dans des circonstances normales, j’aurais entendu les rires et les cris joyeux des visiteurs et le chant des oiseaux.

Efforts de restauration : une tâche monumentale
Après avoir dégagé les débris pour permettre aux campeurs de récupérer leurs effets personnels en toute sécurité, nous avons finalement pu donner le coup d’envoi aux efforts de nettoyage.
Nous avons collaboré avec des entreprises forestières pour récupérer le bois tombé. Au moment où j’écris ces lignes, des piles de troncs d’arbres, dont certains mesurent plus de 200 mètres, jonchent encore les routes et les sites qui étaient autrefois occupés par des terrains de camping.

Les blocs sanitaires, les toilettes sèches, les robinets d’eau, les bornes électriques ainsi que les cabanes du Centre écologique du Canada nécessitent d’importants travaux. Une grande partie de ces travaux est en cours, mais il reste encore beaucoup à faire.
Et peu importe le temps, les efforts ou les fonds consacrés à ces travaux, le parc provincial Samuel de Champlain sera à jamais transformé.
Aller de l’avant en gardant l’espoir pour de nouveaux paysages enchanteurs
Nous nous sommes engagés activement à consacrer nos efforts à la restauration du parc, en profitant de ce nouveau départ pour améliorer les infrastructures et anticiper les besoins de nos futurs visiteurs. Le parc revitalisé comprendra un nouveau centre d’accueil avec des expositions éducatives, une boutique et un service de location d’équipement pour des activités toutes-saisons, ainsi qu’une saison d’ouverture prolongée avec des activités d’hiver telles que le ski et la raquette.

Dans le cadre de nos travaux de restauration, nous planterons 500 arbres indigènes conformément aux objectifs du Programme de conservation des espèces, en partenariat avec Forests Canada.
Durant les décennies à venir, ce qui était autrefois une forêt dense de pins sera désormais une prairie, offrant un habitat à diverses espèces et favorisant la biodiversité du parc. Ces espaces ouverts créeront de nouvelles possibilités d’activités et de nombreuses occasions pour créer des souvenirs inoubliables, même si nous ne cesserons jamais de faire le deuil de tout ce qui a été perdu.
Cette tempête nous a brutalement rappelé que ce qui nous est cher et familier peut rapidement se transformer et devenir un terrain inconnu. Pour le personnel, les bénévoles et les visiteurs, cette expérience a été une leçon d’humilité et un véritable déchirement.
Pourtant, au milieu de cette dévastation, il y a de l’espoir : les efforts inlassables de restauration, la capacité d’adaptation des écosystèmes et la promesse pour les générations futures de trouver beauté et paix dans ces lieux, même si le paysage a bien changé.

