Le mésangeai du Canada : l’ultime oiseau d’hiver

L’expression « La vie appartient à ceux qui se lèvent tôt » nous fait penser aux oiseaux en général.

Toutefois, l’ultime oiseau « matinal » n’est autre que le mésangeai du Canada, également connu sous le nom de geai gris ou Whisky Jack.

Maître des « vacances sédentaires »

Ne craignant pas le froid, cet oiseau nordique ne s’envole pas en hiver vers le sud ensoleillé.

Tout comme le geai bleu, son célèbre cousin, le mésangeai du Canada est canadien jusqu’au bout des plumes. Cet oiseau duveteux à la calotte noire brave la neige et le froid dans le « Grand Nord blanc ». Par temps froid, il gonfle ses plumes pour couvrir ses pattes. Même ses narines sont couvertes de plumes lorsqu’il prend cette forme.

À la fin du mois de février, alors que le printemps n’est encore qu’une promesse de marmotte, le merle d’Amérique commence à rêver d’amour. Le geai du Canada, quant à lui, a déjà une longueur d’avance. En effet, la plupart de ses congénères ont déjà trouvé l’amour. Chaque couple occupe son coin de terre, un territoire de 150 hectares où il coulera des jours heureux.

Un nid douillet

Alors que les merles migrateurs s’envolent vers le Nord, le mésangeai du Canada met déjà les dernières retouches à son nid familial. Un espace douillet, tapissé de cocons, de plumes et de morceaux de fourrure.

Il choisit généralement un endroit abrité sur le côté sud ensoleillé d’un arbre sempervirent, afin de profiter de la chaleur du soleil, bien évidemment.

D’un océan à l’autre

Les mésangeais du Canada vivent dans toutes les provinces et tous les territoires du Canada. Les campeurs qui visitent le parc provincial Algonquin en été n’en apercevront peut-être jamais. Par contre, il est difficile de les manquer en automne et en hiver.

Ces charmants ambassadeurs de l’hiver aiment avoir de la compagnie. L’œil vif et curieux, ils accueillent les randonneurs et les skieurs et les suivent le long du sentier.

L’hiver ne fait pas le poids…

Lorsque les merles migrateurs atteignent le sud de l’Ontario au début du mois de mars, les tourtereaux du Nord sont déjà en train de couver entre trois à cinq œufs.

Les oisillons éclosent au début du mois d’avril, alors que les forêts du Nord sont encore recouvertes de neige et que les lacs sont glacés. Mais ces petits restent au chaud, même en cas de tempête de neige et de températures inférieures à 30 degrés, grâce à la chaleur corporelle de leurs mamans et à la bonne isolation du nid. Les mésangeais du Canada vivent souvent jusqu’à l’âge de 10 ans (le record détenu au parc Algonquin est de 16 ans)!

Les jeunes prennent leur envol dès la première semaine de mai. Ils quittent le nid avant même le retour de la plupart des oiseaux migrateurs!

À table!

Il n’y a pas beaucoup de vers à attraper pendant les mois glacials de mars et d’avril. De quoi vivent donc ces oiseaux intrépides? Comment nourrissent-ils leurs petits?

Les mésangeais du Canada se nourrissent d’insectes, d’araignées, de petits fruits et de champignons. De morceaux de viande prélevés sur un animal mort. D’œufs ou d’oisillons volés dans le nid d’un autre oiseau. Ils peuvent même piquer de la nourriture aux humains, ce qui leur a valu le surnom de « pilleurs de camps ». 

Lorsqu’ils trouvent une bonne source de nourriture, ils en ramassent autant que possible – parfois bien plus qu’ils ne peuvent en manger!

Au frigo…

Les mésangeais du Canada passent la fin de l’été et l’automne à stocker de la nourriture pour l’hiver. Mais leurs réserves ne sont pas entreposées dans un endroit centralisé, comme un arbre creux.

Ces oiseaux intelligents cachent un champignon par-ci, un morceau de charogne savoureux par-là, dans les coins et recoins de leur territoire de 150 hectares. Le mésangeai du Canada est communément appelé « Whiskey Jack », ce qui vient des langues crie et algonquine (Wìsakedjàk en Algonquin, Wihsakecahkw en Cri).

D’abord, ces petits futés font rouler la nourriture dans leur bouche pour l’enrober de leur salive collante.

Ensuite, ils collent ces bouchées gluantes derrière des lambeaux d’écorce, sous du lichen, entre des aiguilles d’épicéa ou dans la fourche d’un arbre. Un seul oiseau peut cacher un millier de morceaux de nourriture par jour.

Cache-cache

Comment font-ils pour trouver tous ces repas? Les chercheurs pensent qu’ils usent de leur mémoire.

Ils ont observé les mésangeais du Canada en hiver. Ces oiseaux ne perdent pas de temps à chercher leur nourriture. Ils ne la reniflent pas et ne la trouvent pas par hasard. Perchés sur une branche, lorsque la faim les tenaille, ils se dirigent directement vers l’un de leurs garde-manger cachés.

Un lien de longue date

Les naturalistes du parc Algonquin observent et surveillent les mésangeais du Canada depuis les années 1960. Il s’agit de l’étude sur les oiseaux la plus ancienne au monde.

Ils ont remarqué que la population de mésangeais du Canada qui se trouve au parc diminue lentement.

Moins de la moitié des territoires de mésangeais du Canada identifiés dans les années 1970 sont occupés par cette espèce aujourd’hui. Les chercheurs pensent en connaître la raison : la chute des températures.

Plus de gel météorologique

La plupart des aliments dont se nourrit le mésangeai du Canada sont périssables. En raison du réchauffement climatique, les hivers sont de plus en plus doux. La nourriture stockée gèle et se dégèle à plusieurs reprises. Cela en affecte-t-il la qualité?

Les naturalistes du parc ont remarqué que les oiseaux semblent abandonner les territoires de bois feuillus et s’installer dans les zones marécageuses peuplées d’épinettes noires.

L’écorce d’épicéa pourrait constituer un meilleur lieu de conservation des aliments. Les naturalistes pensent qu’elle ralentit la décomposition. Il s’agit d’une bonne nouvelle pour les mésangeais du Canada qui ont plusieurs bouches affamées à nourrir.

Mésangeais du Canada ou canaries?

Les travaux scientifiques réalisés dans nos parcs sont essentiels pour nous permettre de nous adapter aux changements que nous observons dans notre monde.

Le mésangeai du Canada est une espèce indicatrice – le canari dans la mine de charbon – et le parc Algonquin se trouve à la limite sud de son aire de répartition. Si le réchauffement climatique se poursuit, cette espèce incontournable et tant aimée pourrait disparaître définitivement du parc Algonquin.

Apprenez-en davantage sur l’habitat du mésangeai du Canada dans la forêt boréale.

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